Festa des Langues Perpignan 2003 : Que les langues se délient !
Déclaration finale
Contribution à la Déclaration Universelle des Devoirs envers les Langues et les Cultures, écrite par les peuples.
Les langues ne sont pas des problèmes de communication. Elles sont des familles de solutions que se donnent les peuples. Comme toutes les solutions populaires créatrices, elles sont récupérées et détournées par les pouvoirs institutionnels, confisquées par les idéologies dominantes, castrées, interdites. Cela oblige les peuples à ouvrir le conflit à partir de leurs minorités, à recréer sans cesse, parfois dans la violence, de l’humanité.
Pour en finir avec un mal de langues partagé par tous, ignoré par beaucoup ;
Pour donner un contenu concret aux projets de construction d’une culture de justice et de paix quotidienne dans le monde par nos quartiers et nos villages, dans nos classes et dans nos villes,
Il est du devoir de chacun et de tous
de s’engager dans la défense collective de toutes les langues comme patrimoine commun de l’humanité, non par conservatisme ou nostalgie mais pour des raisons de civilisation et de développement.
d’alerter l’opinion, les systèmes éducatifs et culturels, les pouvoirs publics, le politique, sur leurs responsabilités envers nos langues.
Non à la pureté : les langues sont toutes égales.
Il faut donner à chacun la possibilité de s’autoriser sa langue. La norme n’a pas à être imposée de l’extérieur, elle est constitutive de la vie de la langue et de ses échanges et n’a rien à voir avec la pureté. Chacun a donc le droit de parler toute langue à sa manière propre.
Car la divergence et le conflit sont la condition de la nécessaire et inévitable réinvention permanente de toute langue vivante, qui s’adapte à son environnement en même temps qu’elle le transforme.
À la fois ciment des sociétés et espace de création de la pensée des personnes, la langue est le nœud vivant de l’humain, celui de ses souffrances intimes et de ses exaltations, celui de ses re-créations.
Non à la hiérarchie : les langues sont toutes en réseau.
Les langues doivent être déliées de la notion de territoire.
Elles ne connaissent pas les frontières et ne sont pas portées à se faire la guerre.
Elles ne sont pas concurrentes mais amies, solidaires et égales sur l’espace global de la planète. Parlées par une même personne, les langues se délient mutuellement.
Non à la compétitivité : les langues sont toutes utiles.
Toutes les langues doivent être enseignées. Une langue non enseignée est une langue qu’on tue.
Toutes les langues doivent être enseignées pour les mêmes raisons. En enseignant une langue au nom de l’utilité on empêche les gens de l’apprendre.
Toute langue doit pouvoir vivre dans la culture et dans le quotidien de tous les hommes qui l’aiment et qui la choisissent, sans se refermer sur elle-même : être parlée, lue, entendue, éditée, pour inventer aujourd’hui le dialogue durable des cultures.
Soyons des écologistes des langues.
Festa des Langues, Perpinyà, le 05 avril 2003
texte écrit collectivement à partir des contributions écrites du public de la Festa et des contributions orales d’une vingtaine d’invités et du public des débats.